Hildegarde von Bingen
Hildegarde von Bingen - Une femme hors normes
Elle fait exploser les cadres, ne rentre dans aucune case, et une définition simple d’elle n’existe pas : j’ai nommé Hildegarde de Bingen, une femme hors-normes qui a bien des choses à nous apprendre, comme elle a tenté de le faire pour ses contemporains, au XIIe siècle !
Hildegarde von Bingen (1098-1179)
par Marie Turquois
Mystique, ayant bénéficié de visions éveillées qu’elle a ensuite couché sur le papier, parchemin plutôt, guérisseuse à l’origine d’un livre de recettes d’herboristerie encore édité de nos jours – et consulté – compositrice de musique religieuse toujours jouée, abbesse en charge de plusieurs dizaines de nonnes, active auteure de lettres adressées aux grands de son monde, Hildegarde de Bingen a illuminé son siècle de ses explications et conseils. Le domaine thérapeutique en particulier mérite que l’on s’y arrête puisqu’elle a grandement innové si l’on se rappelle qu’elle a vécu au Moyen-Age, une époque qui n’aimait pas trop les femmes disant avoir commerce avec Dieu et qui manipulaient les plantes. Hildegarde est considérée à juste titre comme la doyenne des naturopathes pour son utilisation des simples, mais aussi des pierres et de la musique pour soigner le corps et l’âme.
Hildegarde von Bingen - La santé du corps, de l'esprit et de l'âme
On pense qu’elle est née vers 1098 en Rhénanie. Sa médiumnité était avérée dès l’âge de trois ans avec des visions qu’elle préféra garder pour elle – une sage décision ! C’est dans un couvent qu’elle se forma en botanique, musique et pharmacopée. Sa réputation de guérisseuse se répandit, d’abord dans les environs puis ensuite dans le monde chrétien.
Remarquablement intelligente, elle possédait un sens politique aigu qui lui permit d’échapper à l’ire des prélats obtus de son entourage qui voyaient d’un mauvais œil cette petite bonne femme soigner, et surtout guérir : était-ce vraiment catholique tout ça ?? Sachant lire et écrire, elle réussit à faire publier plusieurs livres en latin, langue universelle de l’époque, dont Physica, un recueil indiquant les pouvoirs thérapeutiques de centaines de végétaux et d’animaux.
Ensuite vint Causae et curae, où elle explique le corps humain en se basant sur les théories médicales des Grecs anciens et des Arabes, et en répertoriant les remèdes populaires connus de son temps. Toujours pénétrée des aspects spirituels de la vie, elle voit dans la Chute d’Adam du Paradis terrestre l’introduction de « la mélancolie » dans « son sang », un héritage que l’on peut toutefois combattre en retrouvant la présence divine autour de nous, et en cultivant la santé du corps, de l’esprit et de l’âme.
Hildegarde von Bingen - Une approche holistique
D’autre part, Hildegarde de Bingen a aussi pris le temps de se consacrer au corps féminin, bien négligé à cette époque. En particulier les problèmes touchant l’enfantement l’ont interpellée. Les femmes en mal d’enfant lui écrivaient, ou venaient la consulter de loin, pour recevoir ses conseils. C’est son approche holistique qui la démarqua de ses confrères, ainsi que ses idées sur la prévention des maladies : selon elle, toute approche thérapeutique du patient doit déboucher sur une guérison de l’âme et du corps. Elle est particulièrement attentive à l’alimentation qui doit en fait garder la personne en bonne santé, mais aussi son esprit et bien sûr son âme. Il est une céréale en particulier qui l'a marquée par sa qualité digestive et son action positive sur la santé : l’épeautre, qui a l’avantage de pouvoir pousser sur des sols pauvres. Il suffit de passer le Rhin pour trouver de la farine d’épeautre dans tous les magasins d’alimentation. En France, c’est plus difficile, mais sachez que Hildegarde de Bingen chantait ses louanges ! Utilisant les herbes et les épices, les recettes de ses élixirs aux herbes et de ses tisanes sont toujours commercialisées de nos jours, des livres de cuisine suivant ses recettes sont encore publiés, ainsi que des ouvrages de bien-être suivant ses préceptes. Un herbarium illustré détaille ses herbes préférées (édition du Rocher entre autres) et on peut noter que les analyses modernes confirment leurs propriétés thérapeutiques !
Hildegarde von Bingen - une grande mystique
Innovant, elle n’hésite pas à affirmer que « l'allégresse » joue un rôle dans la bonne santé, et fait intervenir la musique dans sa thérapeutique. Le concept est ancien puisque l’on voit déjà David jouer de la harpe pour dissiper le spleen de son roi. Mais Hildegarde explique que la musique, qui résonne dans les sphères des mondes non habités par les hommes mais par des anges, est capable de rétablir la conscience de l’âme et par là même, guérir les pauvres mortels que nous sommes ! Elle attache une grande importance au corps en tant que temple du Divin, et qualifie les yeux de « fenêtres de l'âme » ! Il nous reste au moins 70 œuvres de sa composition, que l’on peut entendre dans la liturgie contemporaine, ou sur des CDs ! Hildegarde pouvait se montrer révolutionnaire aussi, une entreprise dangereuse pour une femme en son temps ! Au Moyen Âge les femmes ne chantaient pas dans les églises, et seules certaines abbesses l’autorisaient. Pourtant notre Rhénane préconisait le chant choral féminin chaque semaine. Et plus encore, elle avait imposé le port d’aubes de soie blanche et de couronnes dorées pour les chants du dimanche ! Mystique, elle ne pouvait laisser ses religieuses se présenter devant le Christ, leur « fiancé », dans des habits tristounets…
Hildegarde von Bingen - en communication avec les mondes invisibles
Enfin cette femme avait des visions de type « éveillées », autrement dit, elle était parfaitement consciente de ce qu’elle voyait et a pu fournir des explications détaillées de ses incursions dans l’Au-delà. Des tentatives de déstabilisation ont bien sûr existé de la part de jaloux de son pouvoir grandissant, mais sa correspondance avec le pape lui a fourni une protection parfaite. Elle a su rester prudente, ce qui transparaît dans ses affirmations répétées que ses visions ne provenaient ni d’hallucinations causées par la fièvre, ni de folie, ni encore de rêves nocturnes, mais bien du divin. Peu encline à se taire suite à une injonction divine car une « voix du ciel, m’instruisait et disait : Écris ce que je te dis ! », Hildegarde a demandé son avis au grand Bernard de Clairvaux et sur sa réponse positive, elle a rédigé un livre, le Scivias (« Connais les voies »), qui décrit plusieurs de ses visions avec des interprétations à la clef. On y retrouve ses idées dérivées de ses voyages en astral, sa conception que l’homme et l’univers sont de principe divin, et elle adopte le principe d'analogie universelle qui fait de l'Homme un petit monde dans le grand, le microcosme reflétant le macrocosme. Le corps humain devient un temple du divin, à nous de le respecter. Maître Philippe de Lyon ou Edgar Cayce ne parlaient pas autrement.
Hildegarde von Bingen - cosmographie et astrologie
Tout le monde connaît le dessin de Léonard de Vinci intitulé l’homme de Vitruve, montrant un homme dans un cercle. Eh bien, Hildegarde de Bingen avait presque deux siècles auparavant fait le même dessin : un homme dont les bras étendus à l’intérieur d’un cercle reçoit les influences cosmiques divines. Dans la cosmographie qu’elle nous a léguée, sept planètes sont régies par des vents (nous dirions énergies aujourd’hui) apportant bienfaits ou calamités aux hommes. Certaines des illustrations de ses visions ressemblent à des mandalas, ce n’est pas un hasard. Hildegarde nous a aussi laissé des traités sur l’astrologie offrant même une technique pour déterminer le caractère futur d’un enfant. Toutefois, elle prend en compte les astres au moment de la conception, pas de la naissance.
Hildegarde von Bingen - La lingua Ignota
Les amateurs d’occultisme apprécieront son alphabet original composé de symboles ou lettres, dont on ignore malheureusement et la prononciation et l’usage. Plusieurs siècles avant Tolkien, les incursions conscientes de cette religieuse dans l’au-delà avaient déjà donné naissance à une langue unique, la Lingua Ignota - Ces dernières années, des médiums et spécialistes de Hildegarde de Bingen ont tenté de fournir une transcription et une explication de ces signes mystérieux et édité ces cartes à des fins thérapeutiques (Edition: Limarutti Verlag).

une carte moderne correspondant à la lettre b, « maîtriser sa vie »

On a du mal à concevoir que cette guérisseuse passait plusieurs heures par jour à écrire ou à dicter, mais elle était en relation avec des dizaines de personnes ; ses lettres sont étonnantes d’intuitions bien en avance sur leur temps (oui, la terre tourne autour du soleil, oui, le sang circule dans le corps…). Plusieurs de ses missives ont été réunies en un livre, on découvre que leurs destinataires incluaient des prélats, dont le pape, des souverains comme Henri II d’Angleterre ou l’empereur germanique Frédéric Barberousse, des femmes comme Aliénor d'Aquitaine, ainsi que nombre d’abbés ou d’abbesses, mais aussi des petites gens qui faisaient appel à un écrivain des rues pour correspondre avec elle. Bref, sa renommée de conseillère basée sur son don de double-vue et de guérisseuse avait dépassé les frontières !
Hildegarde von Bingen - un modèle de visionnaire
C’est d’ailleurs en partie pour ses écrits, sa musique et ses visions qu’elle a été non seulement canonisée mais aussi déclarée en 2012 « Docteur de l’Eglise ». Les catholiques la révèrent le 17 septembre (jour anniversaire de son départ vers la Grande Lumière, en 1179) et ses reliques sont un lieu reconnu de pèlerinage outre-Rhin (on trouve sa châsse dans la petite église de Rüdesheim sur le Rhin). Au final, la vie d’Hildegarde de Bingen nous offre un modèle de visionnaire qui a réussi à se faire connaître et à transmettre ses visions, tout en mettant ses dons ainsi acquis au service de ses concitoyens, grands ou petits, hommes ou femmes. Cette naturopathe avant la lettre nous prodigue ses conseils médicaux que la recherche scientifique a validé, neuf siècles plus tard ; à nous de l’écouter et, selon son vœu, prévenir plutôt que guérir …
Fabrice Deguy

Séance de soin énergétique qui agit au niveau physique et émotionnel.
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Bonne lecture !

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